Retour d'expérience sur des entretiens d'embauche post

Dec 11 2018 - Savoir vivre de dev

Il y a quelques mois, je me suis mis en recherche active d'un nouveau poste de développeur. J'y ai vu des choses intéressantes qui me semble mériter d'être notées quelque part.

Le contexte

Je suis développeur back, principalement sur du PHP, petite affinité particulière avec Symfony. 10 ans d'expérience.

Au moment de ma recherche, cela faisait 5 ans que j'étais chez TEA, une super boite qui recrute un ou une développeuse, envoyez un mail si vous voulez discuter ! Je me suis mis en quête de nouvelles aventures car 5 ans dans la même boite, aussi bien soit-elle, ça commence à faire. J'avais l'impression d'avoir un peu fait le tour, et je ne pensais plus avoir une énorme valeur ajoutée. Un peu de turnover ne ferait pas de mal. Aussi, marre de faire le trajet super contraignant de mon domicile au lieu de travail, qui me privait de nombreux moments avec ma famille.

Et puis je voulais retourner un peu vers un truc que j'avais déjà fait dans le passé : le management. Je voulais trouver un job avec de la technique avant tout, mais aussi une composante "gestion d'équipe". Peu importe la forme, cela pourrait être lead dev, CTO, monter une nouvelle équipe, que sais-je. Il y a autant de sens derrière ces mots qu'il y a de sociétés.

La séduction par la technique

Je crois que le gros dénominateur commun de toutes les descriptions de postes que j'ai eues, c'est la mise en avant des "technos cools" : on a systématiquement essayé de me "vendre" un poste en me parlant avant tout des outils, des langages de programmations, des frameworks ou des problématiques d'infras (CQRS, Microservices...). Et on m'a très peu parlé des boites en elles-mêmes : leurs valeurs, leurs métiers, leurs business models, leurs façons de fonctionner. C'était ça que je voulais savoir pourtant.

Savoir avec qui je vais travailler est la chose la plus importante pour moi. Surtout que je viens d'une boite qui évolue dans un domaine super cool et plutôt bien au niveau éthique : le livre numérique. J'ai donc certaines attentes à ce sujet.

J'ai un profil assez généraliste : je peux toucher à tout, je m'intéresse à tous les domaines, je peux discuter avec n'importe quel corps de métier, technique ou pas. Par contre je ne suis spécialiste en rien. Et la technique, en soi, je m'en fous un peu : ce qui me motive, c'est de répondre à un besoin correctement, et tant pis si la solution technique à apporter est inintéressante à mettre en place, tant qu'elle est appropriée. Donc quand on m'explique que c'est trop cool de travailler dans telle boite car on essaie régulièrement des nouveaux SGBD et que chacun peut coder avec le langage qu'il veut, au mieux ça m'indiffère, au pire ça m'effraie.

J'ai carrément eu une boite qui s'excusait d'avoir recours à Wordpress parfois pour certains projets, en mode "désolé on sait que c'est chiant et que le code est moche mais c'est adapté à nos besoins". Il ne faut pas être désolé quand on utilise le bon outil : si Wordpress fait le boulot, alors allons-y. Et puis son code n'est pas moche. Il est comme Forrest Gump : il est différent.

Le challenge

Un terme qui ressort souvent : le poste qui représente "un vrai challenge technique". J'aime sortir de ma zone de confort (la preuve, je vais me reconvertir en passant d'un domaine où je suis le roi du pétrole à un métier où je vais galérer). Mais qu'une société me dise en gros "on va en baver toi et moi main dans la main", ça me met en inconfort. C'est peut-être très personnel, mais je vois ça comme une mise de pression, en mode "va falloir assurer mec". Et puis j'ai l'impression que ça trahit une organisation pourrie. Je peux me tromper totalement, mais en tout cas, quand on me parle de challenge, je trouve ça louche.

Equilibre avec la vie personnelle

Point positif : je n'ai trouvé aucune trace de "on a un babyfoot !", "on a une Nintendo Wii !" et autres "On a une table de ping pong !". Aucune entreprise n'a avancé ces conneries en argument de vente. Si mon expérience est significative, alors on a fait un petit pas en avant sur le sujet. Maintenant, personnellement, j'en demande encore plus : je veux une entreprise qui me dise "tu viens chez nous, tu bosses à fond pendant tes 7-8 heures de présence, et tu te casses t'occuper de ta famille, point. De temps en temps on ira boire des coups, mais ça sera tout.". C'est à peu près l'opposée du discours que j'aimais entendre quand je sortais d'école il y a 10 ans.

J'ai annoncé à certains recruteurs que j'étais à 80%. Mercredi off pour m'occuper de ma fille. Mini-panique dans leur réaction, et la petite question posée avec une voix tremblotante : "mais... vous comptez continuer ?". Les recruteuses par contre étaient beaucoup plus bienveillantes. Allez savoir pourquoi...

Equipes jeunes

Un argument que j'ai encore un peu trop entendu : "On a une équipe jeune et dynamique, 24 ans de moyenne d'age !". Quelle horreur. Que des juniors payés au rabais, et c'est censé me faire rêver.

Le télétravail

C'est la dèche. Trop peu de boites le proposent, même partiellement. Et quand elles le proposent, on a l'impression qu'elles nous font une immense faveur. Les managers ne se rendent pas compte de la valeur que peut apporter le télétravail, aussi bien en termes d'organisation que de bien-être et donc productivité des salariés.

La grande force du télétravail, c'est qu'il permet de montrer les problèmes d'organisation d'une équipe. Mais cela est vu comme un problème au lieu d'une opportunité de s'améliorer.

Les pratiques douteuses de certains recruteurs

Je dois constamment être en train de dire aux recruteurs de ne pas parler de moi aux clients finaux. C'est abérrant. Plusieurs fois on m'a mis devant le fait accompli en mode "j'ai montré votre CV à mon client, vous l'intéressez", alors que j'avais à peine échangé un mail de premier contact avec le recruteur.

Je suis devenu vert de rage quand quelqu'un a carrément envoyé mon CV à une boite alors que je lui avais explicitement dit que j'étais déjà en contact avec elle via un autre recruteur. A chaque recherche d'emploi que je fais, j'ai au moins un recruteur qui me met dans l'embarras face à une entreprise. C'est n'importe quoi.

Je précise quand même que tous les recruteurs ne sont pas à l'image que l'on se fait de ce métier. Il y en a des très bons.

Le salaire

De manière générale, les propositions de salaires que j'ai eues me convenaient. Je suis tombé quand même sur quelques pépites :

  • Ok donc actuellement vous êtes payé XXX €. Et à tout hasard, vous seriez prêt à baisser un petit peu votre salaire pour aller ailleurs ?
  • Alors oui certes, cette société n'embauche qu'à 1000 € annuels brut de plus que votre emploi actuel, mais du coup vous passeriez chef d'équipe avec 5 personnes à manager, ça peut être motivant non ?
  • Au niveau rémunération on est à X €, avec comme avantages les tickets restos, la mutuelle, la moitié du transport en commun payé, les congés payés.

Aussi, je ne me cache plus derrière ma passion : oui j'adore développer, mais je suis là avant tout pour l'oseille, le cash, la thune. Rien à faire que le poste soit génial, si c'est sous payé, ça sera sans moi. Là aussi je suis à l'opposée de mon début de carrière, où j'avais accepté un poste payé une misère car je savais que j'allais beaucoup apprendre.

Je n'ai plus trop vécu l'ennuyeuse annonce du salaire à la fin des 3 sessions d'entretiens, tout ça pour se rendre compte que ça ne colle pas du tout. Le sujet est toujours venu assez vite. Aussi, je ne suis pas allé très loin avec les boites qui restaient trop vagues sur le sujet.

Le CEO baladé de toutes parts

Un cas concret qui m'a fait mal au coeur. Une plateforme de réservation en ligne qui a quelques années. Elle tourne, il y a des commandes. Par contre il n'y a plus d'équipe technique : elle a été construite dans la douleur par une succession de prestataires, stagiaires, puis un développeur en interne consciencieux et doué qui a fait tenir le tout autant qu'il pouvait. Triste, mais plutôt classique.

La boite se fait balader entre différents prestas qui font n'importe quoi à chaque fois. Chaque société de service va lui donner un son de cloche différent sur ce qu'il faut faire, avec évidemment le fameux "il faut tout réécrire" qui a mené à une refonte n'ayant jamais abouti.

La palme revient à ceux qui leur ont mis dans la tête de régler leurs problèmes de lenteurs avec des microservices. Non seulement ça ne va pas aider, mais surtout, leur plateforme se comportait mal alors qu'elle n'avait que quelques milliers d'utilisateurs uniques par jour. Et à certaines heures de la journée seulement. Bref, il y avait un script d'indexation mal foutu qui monopilsait les ressources. Et des malades ont proposé des microservices en guise de solution.

Et donc, je me casse

J'ai donc vu pas mal de recruteurs et de boites, pour au final ne pas avoir de coup de coeur. Ce qui m'a poussé au final à avancer un projet de reconversion que je comptais mettre en oeuvre dans quelques années : à partir de juin 2019, je serai vidéaste sur Lyon (et le reste de la France) à temps plein.

Je ne laisserai pas pour autant tomber le développement que je pratiquerai en freelance. Mais j'ai envie de tenter autre chose, à un moment de ma vie où je ressens le besoin de faire une mini pause avec le monde du développement qui me frustre un peu. D'où cet article : les raisons de ce choix pourraient peut-être inspirer certaines personnes à améliorer leur processus de recrutement. Ne voyez pas cet article comme une suite de lamentations d'un gamin pourri gaté (même si c'est un peu ça), mais comme un retour d'expérience. Voici un vrac quelques idées, des choses que j'ai appréciées ou que j'apprécierais :

  • Parler de la boite avant tout, des valeurs, da la "big picture".
  • S'intéresser au télétravail. On est dans le futur maintenant, on a tous le soutils pour, notamment dans notre secteur. Oui OK tout le monde n'est pas fait pour. Mais il faut s'y intéresser.
  • Recruter des développeurs seniors.
  • Etre réactif lorsqu'une candidature arrive.

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